Mythes mongols

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La Mongolie nous a donné à voir quelques mythes, dont bien sûr son mythe fondateur puisque les mongols seraient nés de l’accouplement d’un loup bleu et d’une biche mordorée au bord d’une grande mer, souvent identifiée au lac Baïkal. Vous trouverez l’illustration de ce mythe sur la photo ci-contre.

Dans cet article, nous avons choisi de développer sur trois thèmes plus précisément : le chamanisme, Alan Goa, et Gengis Khan.

  • Chamanisme ou Tengrisme

On ne peut quitter la Mongolie sans parler bien sûr du mysticisme ambiant, de l’empreinte chamanique, et du culte des esprits

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La Mongolie est connue comme un haut-lieu chamanique. Les chamans ont toujours eu une place particulière, sont extrêmement respectés, et toujours actifs. Nous n’avons pas vraiment eu l’occasion d’en côtoyer pendant notre séjour, mais les Mongols nous en ont largement parlé, et l’on a pu percevoir le respect qui leur est toujours conféré.

Cela raisonne avec le lien profond que les Mongols, et notamment les nomades ont avec la nature et les esprits de la nature. Nous avons vu dans chaque yourte un petit autel dédié aux ancêtres et aux divinités vénérées, selon la religion pratiquée, parfois à la croisée du bouddhisme et du tengrisme (Tengri, étant considéré comme le Ciel-Père dans le chamanisme mongol).

Exemple des protecteurs des 4 points cardinaux présents dans chacun des temples bouddhiques que nous avons visité.

Origine du chamanisme (source Wikipédia)

Dans des temps anciens, l’art chamanique fut introduit en Mongolie. Il consiste à entrer en transe afin de se rendre dans des mondes invisibles pour résoudre les dilemmes de la vie. Le cosmos du chaman mongol est constitué d’un ciel éternel bleu (Tengri, également considéré comme Ciel-Père, principale divinité du tengrisme) au-dessus de la Terre-Mère, en une structure verticale. Le Père des cieux domine 99 royaumes dont 55 à l’ouest et 44 à l’est. La Terre-Mère, elle, en possède 77. La totalité forme un arbre cosmique dont les branches s’étendent à tous les niveaux. Il y a des trous entre chaque niveau, qui permettent au chaman de passer d’un niveau à l’autre. Celui-ci connaît les esprits de la chasse et le dieu des héros ainsi que les protecteurs des chevaux et des vaches.

Le chaman met toutes ses connaissances au service de l’homme au prix d’une transe intense, et peut ainsi voyager entre les mondes du bas, du milieu et du haut.

On raconte que cet « art » aurait été introduit par un adolescent nommé Tarvaa. Voici son histoire : Tarvaa tomba un jour malade et perdit connaissance. Ses parents, convaincus de son décès, se hâtèrent de sortir son corps de la maison. En voyant cela, l’âme de Tarvaa s’envola vers le royaume des esprits où le juge des morts lui demanda pourquoi il était venu si rapidement. Trouvant le garçon très courageux il lui demanda quel cadeau il voulait remporter avec lui dans le royaume des vivants. Tarvaa ne voulait ni richesse, ni célébrité. Il voulait obtenir les connaissances de ce royaume des morts. Lorsque son âme rejoignit son corps, les corbeaux lui avaient déjà mangé les yeux. Mais même aveugle, Tarvaa pouvait voir l’avenir. Il vécut bien et longtemps, contant les récits de magie et de sagesse, rapportés des lointains rivages de l’au-delà.

Nous avons également croisé tout au long de notre route des Ovoo, sorte de cairn mongol, qui servent à honorer les divinités des montagnes, ou qui abritent les esprits des lieux et servent à accomplir des rituels.

Ils sont souvent dressés au point culminant d’un col : le voyageur s’y arrête, en fait trois fois le tour, et y ajoute sa pierre ou ses trois pierres pour manifester sa gratitude ou demander protection pour son voyage.

Dans la culture chamanique, l’Ovoo est installé sur une montagne sacrée : un poteau au centre permet de communiquer avec les esprits de la montagne. Autour du poteau sont empilés des pierres, des flèches, des branches de cyprès et des épieux peuvent y être plantés. Des drapeaux de prières sont fixés au poteau et aux autres bouts de bois. On trouve parfois des cordes fixées au poteau, auxquelles sont attachés des os de mouton, de petits drapeaux de prières et des lambeaux de laines rouges.

Voici quelques exemples des Ovoo dont nous avons bien sûr fait trois fois le tour…

Enfin le concept de sépulture remonte à des temps très anciens en Mongolie et nous avons eu l’occasion de visiter un site extrêmement sacré de sépultures, le site d’Uushigiin Uver, qui date de l’âge de bronze et comporte 14 stèles, qui sont des pierres à cerfs sculptées. Ces stèles sculptées ont entre 2500 et 4000 ans et la chaîne montagneuse voisine abriterait environ 1400 sépultures. Les lieux de sépultures étaient bien sûr choisis par les chamans, et les sépultures étaient plus ou moins développées selon l’importante du défunt.

 

  • Alan Goa et la parabole des 5 flèches

Dans l’Histoire Secrète des Mongols, le clan de Gengis Khan lui-même serait issu d’un personnage célèbre et souvent célébré en Mongolie : Alan Goa. Cette femme mystérieuse et sacrée aurait eu cinq enfants : les deux premiers durant son mariage, et les trois suivants après la mort de son mari.

Cela donna lieu à beaucoup de suspicion, notamment des deux aînés, qui pensaient que leurs demi-frères étaient les fils d’un servant.

Alan Goa réunit alors ses cinq enfants et leur donna chacun une flèche. Elle leur dit de casser leur flèche en deux, ce qu’ils firent. Elle donna ensuite cinq flèches à chacun, et leur demanda à nouveau de les casser. Bien sûr ils n’y parvinrent pas. Elle leur dit alors que s’ils restaient seuls, ils seraient brisés comme la flèche, alors que s’ils restaient unis comme les cinq flèches, rien ne pourrait leur arriver, quel que soit leur lien de sang. C’est ainsi que naquit la parabole des cinq flèches.

Quant à la paternité des trois plus jeunes enfants, ils seraient issus d’une immaculée conception (en Mongolie aussi, cela existe…), ou si l’on se réfère plus précisément au texte, ils seraient issus d’un visiteur lumineux qui lui était apparu la nuit par le toit de la yourte, dans une auréole de lumière qui l’avait elle-même empli, et qu’il partait avec les premiers rayons de soleil ou de lune, tel un chien doré.

Elle aurait ainsi dit à ses fils, que les trois plus jeunes n’étaient pas des humains « classiques », et qu’ils seraient Khan. C’est donc en toute logique que Gengis Khan est devenu l’un des descendants de Alan Goa et de l’un de ses trois plus jeunes fils.

  • Gengis Khan, une réalité devenue mythe

Nous ne comptons pas refaire l’histoire de Gengis Khan dans cet article, histoire passionnante au demeurant, mais plutôt s’intéresser à cet homme devenu mythe.

Pour les plus intéressés, vous pouvez lire la biographie de Gengis Khan par José Frèches. Dans cette biographie, on découvre un homme qui a eu très tôt la vision d’un empire mongol, et dont l’inspiration venait notamment d’Alexandre le Grand.

Nous estimons que Gengis Khan a désormais une portée mythique en Mongolie : d’abord parce que tous les Mongols se sentent issus de Gengis Khan, tel un père fondateur ; ensuite parce qu’il a eu une destinée digne des plus grands mythes ; et enfin parce que sa mort et son lieu de sépulture restent extrêmement mystérieux.

Il faut savoir que Gengis Khan est vénéré dans le cadre du culte des ancêtres comme le grand-père de la nation. Il est également souvent considéré comme une incarnation de Tengri.

Ce personnage nous a beaucoup fasciné, nous avons eu énormément d’occasions d’en parler avec les Mongols, et nous tenions à lui donner une place particulière dans notre blog.

 

Pour les plus intéressés, deux mythes mongols

Le chat et le démon (source Wikipédia)

Dans une époque éloignée où les mers n’étaient que boues et les montagnes des collines, Dieu modela le premier homme et la première femme dans l’argile et laissa un chat et un chien pour veiller sur eux alors qu’il partait chercher les eaux de la vie éternelle aux sources de l’immortalité. En son absence, un démon endormit leur vigilance en leur offrant du lait et de la viande et, alors qu’ils étaient distraits, il urina sur la nouvelle création de Dieu. Celui-ci, furieux de voir la fourrure de son œuvre ainsi souillée, ordonna au chat de la nettoyer avec sa langue, sauf la chevelure qui était intacte. La langue râpeuse du chat enleva tous les poils sales qu’elle put atteindre, n’en laissant que quelques-uns sous les bras et sur l’aine. Dieu mit tout ce que le chat avait enlevé sur le chien. Puis il aspergea ses créatures d’argile avec les eaux sacrées de la fontaine éternelle mais ne put leur donner l’immortalité à cause de la profanation du démon.

 

Le cygne

Sur la petite île de Olkhon sur le lac Baïkal, nourri par la rivière Khudar bordée de bosquets de bouleaux, Khori Tumed voit neuf cygnes arriver du nord-est. Ils enlèvent leur robe de plumes et se muent en neuf belles jeunes filles qui se baignent nues dans le lac. Khori Tumed dérobe en silence l’une des robes, de sorte que huit cygnes seulement reprennent les airs, et il épouse la jeune fille qui reste. Elle lui donne onze fils. Ils sont très heureux ensemble mais Khori Tumed ne veut pas montrer à sa femme où il a dissimulé sa parure de cygne. Un jour, elle insiste une fois de plus : « S’il te plait, laisse-moi passer mon ancienne robe. Si j’essaye de franchir la porte avec, tu n’auras aucun mal à m’attraper, je ne risque pas de m’échapper. » Il se laisse convaincre. Elle l’enfile et s’envole soudain par l’ouverture centrale de leur yourte. Khori Tumed a juste le temps de lui saisir les chevilles et la convainc de rester au moins assez longtemps pour donner un nom à leurs fils avant de partir. Alors les onze enfants deviennent des hommes. Khori Tumed laisse sa femme-cygne repartir, elle volette autour de la yourte en bénissant leur clan avant de disparaitre au nord-est.

2 réflexions sur “Mythes mongols

  1. ZONABEND Elishéva

    Hello Charlotte, c’est Moune. Ta mère vient de me parler de votre fabuleux projet et m’a donné l’adresse de votre blog. Magnifique ! Vous réalisez mon rêve de jeunesse qui n’a hélas pas abouti. Je vous souhaite de belles aventures, de belles rencontres et un enrichissement qui fera de vous des êtres plus complets et encore plus ouverts…

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